Peintres aux armées
Mots-clés :
Alphonse Lalauze, Charles Fouqueray, François Flameng, Georges Scott, Joseph-Félix Bouchor, Raymond Desvarreux, Lucien Jonas, peintre officiel, peintres aux armées,
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Dès 1914, le musées de l’Armée et le ministère de la Guerre ont mis en place des missions de peintres aux armées. Ces missionnés ne sont pas des combattants, ils n’appartiennent pas non plus aux avantgardes, ce sont des peintres académiques, ils sont volontaires et
bénévoles. Ils visitent tous les fronts. Au début du conflit les artistes privilégient la banalité plutôt que les combats, impossibles à
traduire. Ils peignent des oeuvres d’exaltation guerrière et d’abnégation patriotique ainsi que des oeuvres de haine de l’ennemi montrant les atrocités commises, propagande ou mise en accusation de la barbarie. On leur demande aussi de s’investir dans le camouflage. Tous ces peintres produisent des dessins, des gouaches, des aquarelles plus faciles à reproduire dans les journaux pour lesquels ils travaillent aussi, comme L’Illustration, le Miroir, par exemple les peintres académiques Georges Scott ou François Flameng.
Les missions d’artistes aux armées, instituées à l’automne 1916, viennent s’insérer dans un ensemble de manifestations et de programmes artistiques existants tournés vers la représentation de la guerre. Dès l’automne 1914, le général Niox, directeur du musée de l’Armée, accrédite avec l’accord du Grand Quartier Général, des peintres pour des missions aux armées. Elles prennent fin officiellement en octobre 1915, mais se poursuivent officieusement bien au delà de cette date. Les participants sont pour l’essentiel des artistes membres de la Société des peintres militaires, présidée par François Flameng, et accrédités peintres du ministère de la Guerre. Voici des œuvres de peintres aux armées (Scott, Flameng, Desvarreux…), noms d’artistes aujourd’hui oubliés. Leurs œuvres ont alimenté l’imaginaire des populations. Leur art se caractérise par de grands traits comme faisant appel à de nobles sentiments (courage, loyauté…). Ces artistes nous montrent des scènes de la vie quotidienne des poilus mais pas de tueries.
Fourreau des peintres officiels de l’armée de nos jours.
Les peintres officiels de l’armée1 en mission dans les corps de troupe, en métropole ou en opérations extérieures, portent en tenue de travail (tenue de combat ou TDF = Terre De France) un identifiant spécifique sous la forme d'un fourreau d'épaule comportant une grenade CTA (corps technique et administratif.) sans les chevrons, soulignée de l'appellation "peintre officiel". L'ensemble des attributs est réalisé en broderie dorée, sans distinction entre les peintres agréés et les peintres titulaires.
Le Petit Parisien, 9 février 1915
Georges Scott (1873-1943)
Classe 1893. Sous-officier. Grandes compositions, dessins teintés.
Membre fondateur de la Société des peintres militaires et peintre du ministère de la Guerre.
Bien connu dans le monde militaire, il avait donné des dessins, en collaboration avec son maître Detaille, pour les nouveaux uniformes de l’armée française, en 1911-1912, et comme reporter pour L’Illustration, il avait couvert la guerre des Balkans, en 1912-1913. Pendant la Grande Guerre, il poursuit sa collaboration avec L’Illustration, tout en travaillant pour le musée de l’Armée.
Mobilisé au 32e régiment territorial d’infanterie en août 1914, il est chargé par le ministre de la Guerre de dessiner des planches à l’usage des combattants, représentant les uniformes et les avions alliés et ennemis, afin d’éviter les confusions sur le champ de bataille. Puis il est attaché à l’état-major du général d’Amade, à Arras, avant de se rendre en Alsace. Il sera affecté au dépôt du 13e régiment d’artillerie en 1915, puis au 20e escadron du Train en 1916.
Sa première mission pour le musée, à partir du 15 décembre 1914, en compagnie de son camarade Devambez, le mène à Amiens et dans la région de Dunkerque, où il rencontre notamment les armées belge et anglaise. Il repart le 9 janvier suivant pour le Nord, toujours avec Devambez, et ne cessera, tout au long du conflit, de parcourir tous les fronts, laissant des images inoubliables. Il est en Alsace en avril 1915, puis à Ypres en mai, dans la Somme en mai-juin, puis en Champagne. L’année suivante, dès le début de l’offensive allemande, il est à Verdun. En 1917, il visite le front britannique, puis, à l’été, invité par le gouvernement italien, il fait deux séjours dans les Dolomites et dans la région de Venise, avant de rejoindre le front ouest en 1918.
Il raconte quelques jours d’une mission à Verdun – « Trois jours dans un poste de commandement de brigade pendant une attaque » – dans L’Illustration, n° 3 853, 6 janvier 1917, pp. 7-9.
Parallèlement à ses activités de peintre reporter, Scott s’occupe de l’organisation du « théâtre du front », qui connaît un grand succès.
Poste alpin dans les Dolomites
Voilà comment ils font la guerre, 1914
Camions de Verdun, 1916
1916, héros de Verdun : le ravitailleur
Une tranchée
Avril 1915 – Effet d’un obus dans la nuit
1915, passage de troupe dans une ville flamande
Affiche de Georges Scott, 1919
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Raymond Desvarreux (1876-1961)
Classe 1896. Caporal au 25e territorial, détaché au musée de l’Armée.
Types intéressants de soldats français, alliés et prisonniers.
Membre fondateur de la Société des peintres militaires et peintre du ministère de la Guerre (19 février 1915).
Caporal au 25e régiment d’infanterie territoriale, il combat à Cambrai, Bapaume, Noyelles, avant d’être hospitalisé en octobre 1914, et mis en congé pour mission à partir du 12 décembre. Il part le 18 pour Amiens en compagnie de Berne-Bellecour, et doit repartir le 11 janvier suivant pour Jonchery-Reims, avec son frère.
En mars 1915, il est déclaré inapte au service. En avril, il travaille dans le camp retranché de Paris, et en novembre il est en mission dans la région de Châlons. En août 1916, il se rend à Pau, dans le camp de l’aviation américaine, et à l’automne il est à Ménil-la-Tour. En mai 1917, il est à Rouen et au Havre, en septembre-octobre à Gondrecourt (Meuse) où il visite les cantonnements américains. En 1918, il est en Alsace en août, dans la région de Reims en septembre, en Alsace à nouveau entre octobre et décembre. Jusqu’au 8 février 1919, il sera à la disposition du musée comme peintre.
J. Delignières, soldat du 128e régiment d'infanterie de ligne, La Marne
Soldat anglais avec masque à gaz
Peter Diamond, tambour anglais
Fantassin du 47e Bataillon de Chasseurs-Alpins
Mac Mivin, cornemusier écossais, Argyll and Sutherland Highlanders
Fusilier mitrailleur anglais
Porte-drapeau américain
Voir le lien :
http://www.photo.rmn.fr/Raymond Desvarreux
François Flameng (1856-1923)
Dégagé de toute obligation militaire.
Très particulièrement intéressante série d’études, aquarelles et peintures offerte au musée de l’Armée.
Membre fondateur de la Société des peintres militaires, il en est le président d’honneur dès 1913. Il est également peintre du ministère de la Guerre.
Peintre du Tout Paris, il est membre de l’Institut en 1905 et professeur chef d’atelier à l’École des Beaux-Arts en 1914.
Véritable historiographe de la vie du front, missionné par le musée de l’Armée dès décembre 1914, il parcourt l’ensemble du front tout au long de la guerre, laissant un important ensemble de gouaches et d’aquarelles, qui sont reproduites par L’Illustration à partir du 25 septembre 1915. Il bénéficie d’une situation privilégiée en raison de son âge et de sa réputation.
Ses aquarelles – plus de 210 –, peintes pour le musée, seront présentées au Salon de 1923. Consacré à l’Apothéose de l’Armée française, des origines à 1918, ce projet sera repris à sa mort par son élève Charles Hoffbauer (voir L’Illustration, n°4275, 7 février 1925, pp. 119-122). entrent dans les collections en 1920 par un don conjugué d’Émile Deutsch de La Meurthe et de lui-même.
Voir les liens :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65600002?rk=128756;0
http://www.photo.rmn.fr/Flameng
Voir l'article sur François Flameng :
http://87dit.canalblog.com/archives/2017/03/31/35108812.html
Charles Fouqueray (1869-1956)
Classe 1889. Service auxiliaire non mobilisé. Peintre de la Marine.
Fusiliers marins.
Il est sur le front dès octobre 1914, sur l’Yser, à Dixmude, Ostende, Nieuport, et dans la Somme. Puis il rejoint l’armée navale et part pour l’Orient, en Syrie, Égypte, et à Constantinople. Il réalisera après la guerre une grande Prise du fort de Douaumont.
Il publie des Croquis de guerre pris en Flandre, 1914-1916, un Album de Dixmude, un Album des fronts du Nord. Il participera aux missions artistiques en mai 1917, et en juillet, pour la Marine.
Fouqueray, dont la famille est originaire de Fouras, en face de l'île d'Aix, est issu d'une lignée de marins. Ses dons artistiques décelés, il étudie chez Cormon et obtient le prix Rosa Bonheur en 1901. De nombreux tableaux de la vente représentent la côte Atlantique qui lui est chère depuis son enfance.
Sa carrière de voyageur débute en Belgique et aux Pays-Bas à l'automne 1897, et se prolonge en Espagne. Là bas, il apprend la déclaration de guerre en août 1919. Peintre de la marine depuis 1908, il rejoint naturellement les fusiliers marin de l'amiral Ronarc'h à la frontière Belge.
Fouqueray alterne les théâtres d'opérations terrestres et maritimes : Dixmude, la bataille de Douaumont, Nieuport.
Brigade des fusiliers marins
Joseph-Félix Bouchor (1853-1937)
Dégagé de toute obligation militaire.
Types et vues de terrains.
Il est l’auteur des premières oeuvres de la guerre entrées au musée de l’Armée, relatives à l’arrivée aux Invalides des premiers emblèmes pris à l’ennemi, en octobre 1914.
Il gagne la région de Reims avec la première mission du musée, en décembre, en compagnie de Flameng et Jacquier, puis on le retrouve près de Verdun et de Nancy.
Début janvier 1915, il est en Argonne, puis dans le sud de l’Alsace, repasse en Argonne, puis y revient en mai-juin, avant de repartir pour l’Alsace en juillet. Fin octobre-début novembre, il est en Artois et en Belgique.
En 1917, il est à Verdun, entre juin et septembre.
Nombre de ses oeuvres de la guerre sont reproduites ans les ouvrages qu’il a publiés, seul, Souvenirs de la Grande Guerre (1914-1915), Paris, s.d. [vers 1916], et en collaboration avec le capitaine Delvert, Verdun, Paris, 1920.
Les musées de l’ordre de la Légion d’honneur, à Paris, et de la Coopération franco américaine, à Blérancourt, conservent nombre de ses oeuvres de guerre.
Autoportraits
Joseph-Félix Bouchor (1853-1937), artiste peintre paysagiste et portraitiste, aujourd'hui qualifié de "petit maître", naît à Paris dans une famille aisée. Il reçoit un enseignement académique auprès de Jules Lefebvre ou Benjamin-Constant. Épris de voyages, il part à l'aventure et décrit dans sa peinture les paysages exotiques qu'il a le souci de faire découvrir. À Paris, il accompagne son frère, le poète Maurice Bouchor (1855-1929), dans la vie de bohème montmartroise.
Lorsque la guerre éclate en 1914, il est - à 61 ans - trop vieux pour s'engager, mais il a des relations. Le Général Niox, directeur du Musée de l'Armée aux Invalides depuis 1905, l'autorise à se rendre sur le Front pour peindre. Bouchor n'a pas le statut officiel de peintres des armées, ce qui lui permet d'échapper à certaines contraintes (dont Félix Valloton se plaindra). Vêtu de l'uniforme d'officier d'artillerie, il se déplace à l'arrière des lignes, principalement dans la Somme, pour y peindre paysages (maisons bombardées, églises en ruine...), scènes de la vie quotidienne des soldats (déplacements de troupes, camps de prisonniers...) ou portraits (le Général Joffre, le poète italien d'Annunzio, Néozélandais et Maoris, prisonniers bulgares...).
Cathédrale de Soissons après les bombardements
Voir les documents :
Voir le site :
https://sites.google.com/site/amicale22bca/Bouchor
Alphonse Lalauze (1872-ap. 1938)
Portraits et divers.
Membre fondateur de la Société des peintres militaires et peintre du ministère de la Guerre. Il collabore à des journaux illustrés, et est en mission dans la Somme, en Alsace et en Lorraine, en août-septembre 1915, puis en Champagne, en octobre.
Il participera aux missions artistiques en novembre 1917 et en janvier 1918.
Le Papyvore, N°40 2 nd semestre 2014
A. de Broca
Lucien Jonas (1880-1947)
Le Petit Journal, 22 août 1915
Classe 1900. Soldat du service auxiliaire de la 22e section de COA. détaché au musée de l’Armée.
Portraits, vues de localités.
Mobilisé fin décembre 1914, il est affecté au 127e régiment d’infanterie, avant d’être classé dans les services auxiliaires – il refuse la réforme – en février 1915.
Volontaire pour des missions, il est affecté à la 22e section COA et détaché comme peintre du musée de l’Armée.
Il part pour le front avec Berne-Bellecour, le 29 mars 1915, parcourt la Somme, le Nord et la Belgique cette année-là, et la région de Verdun, la Champagne, la Lorraine et les Vosges en 1916. Début 1917, il est chargé d’une mission à Montbard et au Creusot pour le ministère de l’armement, puis se rend dans la Somme à l’été, et en décembre en Italie. Il rencontre à plusieurs reprises les armées anglaises et américaines.
Il se spécialise dans les portraits des chefs militaires et collabore avec les journaux illustrés –L’Illustration et La Guerre documentée notamment –,auxquels il donne de nombreux portraits et des scènes de genre.
Il travaille également à des lithographies et des affiches. Une partie de sa production de guerre – environ 8000 pochades et 4000 dessins ! – est publiée en albums de fac-similés (librairie Dorbon-Ainé, Paris).
Des expositions de ses oeuvres de guerre se tiennent à Paris, à la galerie Devambez en mars-avril 1916 (avec catalogue), à la galerie Chaine et Simonson en 1919.
Des albums de fac-similés des dessins de guerre de Jonas sont publiés à partir de 1916.
Le musée de l’Armée conserve plus de 150 tableaux et dessins de Jonas, réalisés entre 1915 et 1918.
Absolution des volontaires, 1915
Conquéte du fort de Lorette, Artois 1915
Corps à corps
Le guetteur
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Voir l'article sur Julien Lemordant :
http://87dit.canalblog.com/archives/2016/02/22/33410524.html
Voir l'article sur Peindre la Grande Guerre :
http://87dit.canalblog.com/archives/2014/02/05/29124759.html
Voir l'article sur Dessins de guerre :
http://87dit.canalblog.com/archives/2016/02/27/33433926.html
Voir l'article sur Francisque Poulbot :
http://87dit.canalblog.com/archives/2016/03/30/33575127.html
Voir l'article sur Henri Henriot :
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